• On me demande souvent : "Est-ce que je dois tout peser, tout mesurer ? J'ai jamais rien pesé, ni mesuré et j'ai toujours de beaux pains"

    Ma réponse est qu'il existe plusieurs façons d'apprendre et que chacun a sa manière, d'autant plus que le but c'est de trouver sa propre voie. Les deux principales sont :

    - la voie de l'observation : Par le fait de mesurer, on peut parvenir à trouver une méthode pour faire du pain qui nous plaît et qu'on peut reproduire. Au fur et à mesure on va apprendre à sentir et reconnaître la texture de la pâte et observer les influences des changements dans le résultat final. Avec le temps, mesurer ne sera plus nécessaire parce qu'on aura acquis suffisamment d'expérience que pour "sentir" la pâte et guider la panification sans mesurer.

    - la voie sensible : Certaines personnes ont déjà un toucher plus sensible et peuvent se passer de mesurer. Ils feront leur expérience en ressentant les différences dans la pâte et en tireront les conclusions pour arriver à une méthode qui leur plaît. Ce n'est pas nécessairement plus facile ou plus rapide que la première méthode, c'est une histoire personnelle.

    Les deux voies ont des avantages et des inconvénients, des réussites et des ratés. Elles conviendront aux uns et pas aux autres et inversement, chacun doit trouver sa voie qui sera peut-être une voie parallèle ou entre les deux.

    Personnellement j'ai d'abord besoin de voir et puis c'est avec la pratique que je sens. Maintenant je mesure encore certains paramètres, par habitude, mais je m'adapte toujours en fonction de ce que je sens. C'est d'ailleurs ça pour moi le métier de boulanger: savoir s'adapter rapidement à des conditions changeantes pour obtenir des pains qui plaisent.


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  • Le travail est l’amour rendu visible. Et si vous ne pouvez travailler avec amour mais seulement avec dégoût, il vaut mieux vous asseoir à la porte du temple et recevoir l’aumône de ceux qui œuvrent dans la joie. Car si vous faites le pain avec indifférence vous faites un pain amer qui n’apaise qu’à moitié la faim de l’homme. Et si vous pressez le raisin de mauvaise grâce votre regret distille un poison dans le vin. Et si même vous chantez comme les anges et n’aimez pas le chant, vous fermez les oreilles de l’homme aux voix du jour et de la nuit.

    Le Prophète de Khalil Gibran

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  • Voilà on est plus d'1 an plus tard, mais enfin il est jamais trop tard pour publier la suite des aventures du levain. Les photos et les vidéos sont prêtes depuis des mois et tous les détails avaient été notés par mes soins.

    Ça y est tout est prêt pour faire du pain. Mais avant de commencer j'aimerais faire une grosse parenthèse : il n'y a pas de recette pour faire du pain, il y a des proportions et des paramètres que l'on peut modifier à sa guise et qui vont forcément influencer le résultat.

     On commence par se pencher sur les proportions, en boulangerie on calcule tout à partir de la farine. Le taux d'hydratation de la pâte n'est pas le pourcentage d'eau dans une pâte, mais bien le pourcentage d'eau par rapport à la farine. Par exemple, si on a 1000 g de farine et 600 g d'eau dans une pâte, le pourcentage d'eau est 600/1600x100 = 37,5% de la pâte. Mais en boulangerie on calcule autrement :

    • on considère la farine (ou les farines) comme représentant 100%, dans notre exemple 1000 g

    • l'eau est calculée par rapport à la farine, dans notre exemple 600 g représente donc 60% de la farine

    • le sel aussi est calculé par rapport à la farine, par exemple 17g donc 1,7% de la farine

    Chaque ingrédient est donc calculé par rapport à la farine. Le levain ou la levure sont aussi exprimés en pourcentage par rapport à la farine. Ces proportions varient d'une recette à l'autre, d'un boulanger à l'autre, d'un type de pain à l'autre. L'hydratation de la pâte va influencer le résultat final, mais le travail de la pâte va aussi en être influencé. Une forte hydratation donne une mie souple et alvéolée, mais la pâte est plus difficile à travailler, élastique et collante. Dans le cas contraire, on aura une pâte plus facile à travailler, ferme et sèche, mais le pain sera plus sec et dense. Tout est une question d'équilibre et de trouver ce qui te convient le mieux.

    La quantité de levain dans la pâte est calculé par rapport au temps de fermentation que l'on souhaite en fonction d'une température donnée. Si on veut on peut faire du pain en 2h, la part de levain dans la pâte représentera la moitié du poids total de la pâte, pour 3h ce sera un tiers, pour 4h un quart, … C'est une donnée théorique sur base d'une fermentation à 25°C. Si la pâte lève au froid, le temps de fermentation doit être adapté.

    L'hydratation du levain a également son importance, puisqu'un levain liquide apportera de l'eau dont il faudra tenir compte pour le calcul de l'hydratation de la pâte. Pour éviter de faire des calculs compliqué ou de le faire « au pif », je te conseille d'hydrater le levain au même taux que le pain, et volià.

    Au delà des proportions il y a encore pas mal de paramètres qui influencent le résultat final :

    • la farine : son taux d'extraction (blanche - bise - complète - intégrale), la céréale ou le mélange de céréales utilisées (le blé, l'épeautre, le seigle, l'engrain, le sarrasin, ...), son taux de protéines, sa capacité d'absorption d'eau, ...

    • la qualité de l'eau

    • le sel influence le goût du pain, la couleur de la croûte, la souplesse de la pâte, ...

    • le ferment utilisé : levain, levure, miel et sel, ...

    • le levain, son taux d'hydratation, la quantité dans la pâte, son état de fermentation (jeune ou vieux), la farine utilisée, le nombre de rafraîchis, ...

    • la quantité de pâte, en masse une pâte réagit différemment qu'en petite quantité

    • le pétrissage : manuel ou mécanique, doux ou intensif

    • le façonnage : serré ou relâché, en moule ou en banneton

    • le temps de fermentation

    • la cuisson : la température, le type de four, ...

    • la température de la pâte

    La température de la pâte est un des paramètres que les boulangers cherchent à calculer pour pouvoir guider la fermentation et ainsi maîtriser au mieux le processus de panification. La fermentation est généralement optimale aux alentours de 25°C. En bref il y a quatre critères pris en compte pour le calcul de la température de la pâte : la température ambiante, la température de la farine, la température de l'eau et le pétrissage. Le boulanger additionne les trois températures et en fonction du pétrissage détermine une température de base, car le pétrissage peut élever la température de la pâte. Ensuite il déduit de la température de base la température ambiante et la température de la farine ce qui lui donne la température à laquelle il doit verser l'eau dans le pétrin.

    Pour un pétrissage manuel qui n'échauffe pas la pâte, la température de base est 75. Si la température ambiante est de 20°C et la température de la farine de 18°C, il faudra chauffer l'eau à 37°C (75-20-18=37). Il s'agit évidemment d'une règle théorique qu'il faut éprouver et adapter en fonction des résultats obtenus en pratique.

    Pour faire son pain à la maison, le plus simple est de préparer les ingrédients la veille afin que tout soit à température ambiante. Il est évidemment préférable que la température ambiante soit entre 20 et 25°C. 

    Il est également possible de pratiquer la fermentation à froid et de ralentir le processus de panification afin de l'étaler sur 2 jours et ainsi mieux organiser le temps de travail.

    Il y a donc une multitude de facteurs qui peuvent influencer le pain et qui font que d'une fois à l'autre avec la même méthode le pain peut être différent. Il faut garder en tête qu'au plus il y a de précision lors de la panification au plus il y a de chances que la panification soit maîtrisée.

    J'encourage chacun à oser à expérimenter. Il n'y a pas de bon ou de mauvais pain. Chaque civilisation a fait des pains de manière différente. L'important est que celui qui fait le pain y prend du plaisir et que le résultat obtenu plaise à celui qui le mange.

     

     


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